Des Jours Et Des Nuits

Entre l'adaptation télévisée de "Des jours et des nuits" et le roman de Gilbert Sinoué, des variantes. Deux histoires intimement liées. (Titre en Espagnol "la Mujer Del Sueño")

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Lieu : France

mercredi, janvier 19, 2005

Les vieux amants par Armelle Godeluck

Lire, juin 2001

Le roman s'ouvre sur une étreinte fougueuse qu'interrompt un grondement qui devient vacarme et tremblement... C'est là que le dormeur s'éveille plein d'angoisse, encore terrifié par la présence et l'intensité de son rêve. Le lecteur, lui, a bien décelé une incongruité dans la façon plutôt compassée qu'avait la jeune femme du rêve d'inviter son amant à passer à l'acte :

«Aube de ma vie, je te le redis : point de honte dans ce qui est licite. Viens..

Pour sa part, le héros, Ricardo Vacarezza, vivant dans l'Argentine des années trente, mettra du temps à se persuader que cette femme qui le hante la nuit et lui apparaît même le jour, il l'a aimée passionnément dans une autre vie, il y a trois mille ans, sur une île grecque. Cette femme, réincarnée comme lui, vit sans doute aujourd'hui quelque part dans le monde. Aussi s'est-il mis en tête de la retrouver coûte que coûte, dût-il abandonner sa fiancée, sa fortune et sa terre... Gilbert Sinoué est un bon conteur et il peut sans crainte nous embarquer dans un récit invraisemblable qui mêle un chaman indien, des gauchos, une psychanalyste argentine férue des théories de Carl Gustav Jung sur l'interprétation des rêves et des archéologues britanniques en mission sur un chantier grec; nous nous laissons prendre comme des enfants à qui l'on raconte un joli conte de fées.

Entre le script de Frédéric Madral et le roman de Gilbert Sinoué, un fossé.

Ce n’est pas la même histoire qui est contée ; Celle adaptée à l’écran est bien plus proche de nous.

Pour commencer, elle se passe en France et puis qu'il est facile de s'identifier à l'acteur principal.

Il est rendu par un Stéphane Freiss jeune cadre dynamique français blond de la trentaine bien sonnée stoppé en pleine course,
bien plus humain dans son désarroi et moins matcho que le Ricardo du roman au type latin raide et fier comme un torero espagnol,
aux traits taillés à la hâche et basanés comme les reliefs et les couleurs de l'Argentine pays de culture éloignés, à l'autre bout du monde.

Le téléfilm marque l'accent sur la vulnérabilité et les failles du héro pour mieux décrire le processus qui l'affecte. Ainsi le scénariste Philippe Madral n'hésite pas à malmener le héro, le rendant sujet à des malaises et accidents qui le mènent nombre de fois dans des structures médicales. L'accent est mis sur l'analyse de ses troubles et le débat sur la folie est sous-jacent.

Le passage chez la thérapeute yungienne est abrégé. Le héro ne se trompe pas d'interlocutrice et n'a pas le temps de se perdre dans l'étude des mythes ni de s'apitoyer sur son sort. Il vit dans l'urgence.

Dans le roman, l'auteur pour sa part a choisi de développer les entretiens avec la psychanaliste d'un héro aux caractéristiques plus viriles.

Le débat s'étale sur une durée de quelques mois pendant lesquels elle prend le relais à ses côtés pour l'aider à accomplir un travail d'interprétation, de traduction suite à la retranscription de ses rêves et hallucinations tantôt visuelles tantôt auditives.
Ils étudient ensemble.

Quand elle veut poser les règles en distribuant les rôles lui-patient, elle-thérapeute et quant à la durée indéterminable, lui les remet en cause et rétorque : "suis-je donc malade ?"

L'argument qu'elle avance et sur lequel cessent toutes objections (et avec elles le débat sur la psychanalise) c'est qu'elle peut prétendre au rôle du thérapeute pour s'être livrée elle-même au rôle du patient pendant une durée de 10 ans.

L'expérience humaine au sens d'humilité et d'humiliation reconnue semble faire effet sur Ricardo et forcer son respect. (voir Chap. 10)

- « Je serais donc malade ? »

- « Un être qui cherche et qui décide d’accomplir un voyage au sein d’une galaxie qui sommeille en lui n’a rien d’un malade. Il possède une âme, c’est tout, et il a décidé de se mettre à son écoute. La maladie au sens propre du terme, c’est autre chose. »

l'histoire selon Philippe Madral

Sujet : « Un homme voit son quotidien bouleversé par la vision d'une femme qu'il aurait aimée dans une autre vie. »

L’histoire selon Philippe MADRAL :

Richard Deligny, se prend à rêver régulièrement d’une belle inconnue, vêtue façon Grèce antique. Il la voit d’abord de nuit dans ses rêves, puis c’est le jour qu’elle lui apparaît.

Dans l’univers matérialiste de ce PDG français d’une grande entreprise, de telles expériences sont pour le moins perturbantes. Perturbé au quotidien par ce qu’il convient de qualifier d’hallucinations il s’interroge, en parle à Clara sa femme depuis 20 ans, et consulte à sa demande mettant cela sur le compte du surmenage.

Son médecin lui prescrit des antidépresseurs afin de supprimer les visions et les rêves.

Mais ce n’est pas ce qu’il désire au fond de lui. Il ne peut résister à la tentation de voir encore ce que cette femme veut lui montrer. Il profite alors de l’absence de sa femme partie en voyage professionnel pour stopper le traitement et élucider le mystère. Il se lance dans des investigations à partir des indices que lui livrent ses visions.

Une nuit avant de s’endormir il se munit d’un dictaphone. Au réveil, la bande a enregistré des mots en grec ancien. Ils font état de sa rencontre nocture avec la femme. Il est interloqué car il n’a jamais étudié cette langue.

Il comprend que la psychothérapeute yungienne qu’il rencontre peut l’aider à approfondir ses connaissances en mythologie grecque pas à obtenir les informations qu’il est venu chercher.

Il comprend que c’est sur place qu’il doit se rendre, aussi limités que soient les éléments en sa possession.

Bien-sûr il passe pour un fou et suite à un malaise qui le conduit à l’hopital, il finit par perdre sa place au sein de son entreprise.

Il ne donne pas non–plus comme prétendu suite à son entretien avec un ministre alors qu’un nouveau poste à responsabilités aurait pu être à la clé. Sa femme s’inquète et voit son couple tomber en morceaux cependant elle choisit encore de lui faire confiance.

Lors d’une autre vision il pénêtre dans le miroir à travers duquel il voit une autre réalité. Mais reste bloqué à l’intérieur. Pour en sortir il doit se saisir d’une statuette d’époque et briser le miroir. Il se blesse et se retrouve de nouveau à l’hopital.

Cette fois il est allé trop loin. Son délire en est venu à menacer sa vie voire celle des autres estime le médecin de famille que sa femme est venue consulter car elle même se trouve en position de détresse devant la situation. Ce prétexte est une raison suffisante pour le faire interner. C’est ce qu’ils font. Il n’a plus de vision mais son état ne fait que s’aggraver. Accablé de traitements contre son gré, retenu prisonnier il perd la vie peu à peu, mais que faire dans son état ?

Sa femme constatant qu’elle le perd de toutes façons décide de lui rendre la liberté et n’a d’autre recours pour l’extraire aux griffes du système hospitalier que de le kidnapper. Enfin libre bien que fragile, il prend l’avion pour Athène.


(Seconde partie)

En vol, parti guidé juste par sa foi, Richard lit un magazine et s’arrête sur une photo prise lors de fouilles archéologiques. L’un des trois personnages est une femme qu’il reconnaît sans équivoque : c’est la femme de ses rêves.

Dès son arrivée sur le sol grec, la chance le sert encore. A peine a-t-il posé ses valises à l'hôtel qu'il l’aperçoit dans le hall. Il la poursuit alors qu’elle monte en taxi et lui parle à travers le vitre mais elle ne l’écoute pas. Elle disparaît, emportée par le taxi.

Il lui reste la photo. Seule information tangible (réelle en la réalité du jour, folie des autres) pour la retrouver, il va aussitôt lancer sa recherche en contactant le journal dont elle est extraite. A partir de cet indice il parvient à rencontrer le photographe qui l’a prise.

La femme sur la photo est floue, lui répond-il puis il évoque le reportage effectué quelques mois plus tôt et donne des informations sur son déroulement ainsi que l’identité d’un des archéologue présent sur la photo. Il laisse entendre qu’il se passe des hitoires au sujet de la fresque que le deuxième homme archéologue-écrivain propose comme sa découverte dans son nouveau livre. SERGIOU le chercheur du ministère de la culture accuse son confrère de falsification d’objets historiques. Selon lui, il s’agirait d’un faux. Pourtant la polémique reste sous-jacente, non divulguée au public.

Quant à la femme, ce doit être l’une de ses assistantes.Prochaine étape pour Richard : rencontrer ces hommes.

Par jeu de relations Richard parvient auprès de SERGIOU.
Sa tentative cependant est infructueuse. L’homme dit ne pas connaître la femme. Déçu Richard fait un malaise. Le temps de retrouver ses esprits il se souvient de ce que la belle lui avait dit en rêve et pose la question au savant. Existe-t-il une île dénommée ronde en Grèce ?

Réponse négative encore. Reste un dernier espoir : retrouver le taxi.
Dés le lendemain il lui demande de le mener là où il a mené la femme. Au terme de routes sinueuses à travers les collines ils parviennent sur un site de fouilles. Elle est là exerçant son métier d’archéologue.Il lui parle. Elle le reconnaît mais le repousse prétendant ne pas être celle qu’il cherche.

Il insiste. Son discours incohérent passe pour une tentative de drague et elle fait clairement comprendre qu’elle n’est pas intéressée et qu’elle a du travail.

En tant que scientifique elle a fait beaucoup d’efforts pour arriver là où elle est maintenant et c’est tout ce qui compte pour elle. Il obtient quand même de diner avec elle quand il mentionne qu’il connaît un détail secret de son anatomie : une cicatrice.

Même alors qu’elle est charmée et avoue passer un moment agréable en sa compagnie. Elle n’a pas de vision comme lui et lui répéte qu’il se trompe, qu’elle n’est pas celle qu’il cherche.Même surprise du degré d’intimité qu’ils ont ensemble et qui la font lui faire des confidences, toute cette histoire qu’il est parvenu à lui raconter lors du diner finissent par lui faire peur et elle lui demande de renoncer à la voir. Elle parvient à réfuter ses arguments en trouvant des parades. La cicatrice, il peut l’avoir vue s’il la suivie quelques temps auparavant alors qu’elle faisait un séjour où elle se baignait en public chaque jour. Quand aux révélations qu’il lui fait en grec ancien avant de sombrer dans le coma, elle pense sur le coup à un coup de pouce de son père avec qui elle est fachée.

Une fois de plus à l’hopital elle le remercie pour ce qu’il a fait pour elle. Il est parvenu à complèter la traduction que son père lui avait faite. Bien que n’ayant jamais étudié cette langue il le lui a chuchotté à l’oreille avant de s’évanouir. Puis elle le quitte lui demandant de la laisser tranquille et de ne jamais la revoir.

Désespéré, à bout de forces, c’est sa femme qui vient le trouver et veut le ramener en France. Alors qu’elle signe les papiers de sortie il est assis et alors qu’il n’avait plus eu de visions depuis de la femme brune depuis qu’il l’avait trouvée dans la réalité sous l’identitié de Dora, il l’a voit au bout du couloir qui lui fait signe de la suivre.

Elle le prend par la main et l’emmène. Ce n’est pas une nouvelle vision mais bien elle qui lui avoue qu’elle l’aime pour ce qu’il est à présent et que c’est tout ce qui compte au-delà de son histoire de réincarnation dont elle ne veut plus entendre parler. Ils peuvent enfin vivire leur amour mais il reste quelque chose qui le mine.

Il obtient alors qu’elle le suive sur le site pour tenter une dernière fois de lui faire ressentir (pas voir ni entendre mais sentir) ce qu’il a lui même vécu pour qu’elle aussi se souvienne. Mais sans résultat.

Alors qu’ils sont assis devant l’entrée, elle aperçoit dans l’herbe une figurine. C’est un cadeau des dieux qui signifie qu’ils bénissent leur union. Alors elle tombe inanimée et a enfin la vision elle aussi. Quand elle reprend conscience elle l’avoue à Richard. Tout est accompli. Ils peuvent partir ensemble. Ils disparaissent ensemble au monde tel qu’ils l’ont connu et tels qu’on les y a vus.

DES JOURS ET DES NUITS Origine : Fra. 2004. Réalisation : Thierry Chabert. Scénario : Philippe Madral. Distribution : Stéphane Freiss (Richard Deligny), Claire Nebout (Clara Deligny), Caterina Murino (Dora), Nicolas Moreau (Antoine) Musique : Jean-Claude Nachon et Angélique Nachon.

Seul car qui pourrait le croire hormis elle ?

Bien qu’il aime la femme qui vit à ses côtés et qui l’a accompagné jusque là dans la vie, le cœur de Richard bat d’un tout autre accord pour celle qui l’obsède désormais. Folie ?

«La folie vient du regard des autres», diagnostique l'acteur Stéphane Freiss qui joue le rôle du héro. «Ma grand-mère est décédée suite à une schizophrénie paranoïde, elle était persuadée qu'elle était surveillée par ses voisins... Richard croit ce qu'il voit, il pense qu'il a connu et aimé cette femme dans une vie antérieure. C'est par le jeu des comédiennes que sa folie existe.» En effet le héro est le théâtre du combat que se mènent les deux femmes en son cœur.

"Les rêves de Richard lui font suivre une femme vêtue comme à l’époque Dorienne. Elle lui révèle qu’elle lui parle du royanme des morts où il ne peut la suivre plus avant car il doit la chercher dans l’autre réalité, celle des vivants. Elle lui montre le site où ils se sont connus et aimés 3000 ans auparavant, et lui demande de le retrouver dans la réalité. »

Richard Deligny a tout pour être heureux, une épouse et un fils qu'il aime et un métier qui lui réussit. Mais, une nuit, il rêve d'une femme qui n'est pas la sienne et finit par la «voir» le jour, dans la rue et chez lui. Troublé, l'homme en perd le sommeil, consulte et reprend à son compte les mots de Verlaine :

«Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant d'une femme inconnue et que j'aime et qui m'aime»

... Surmenage, crise de la quarantaine ou schizophrénie à tendance paranoïaque ? Qu’importe. L’attrait de l’aventure qui lui est proposée de vivre l’emporte sur le reste.

Seul car qui pourrait le croire hormis cette femme surgie d’un passé vieux de 3000 ans et qui depuis le monde des rêves l’engage à la retrouver dans la réalité et au présent.

lundi, janvier 17, 2005

"Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vecu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu ...

... Je t'ai faite a la taille de ma solitude

Le monde entier pour se cacher

Des jours et des nuits pour se comprendre

Pour ne plus voir dans tes yeux

Que ce que je pense de toi

Et d'un monde a ton image

Et des jours et des nuits regles par tes paupieres."



(Paul Eluard)


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